COMMENT pratiquer une convention égalitaire de langage ?
Voici donc 10 petites propositions pour remplacer celles écrites par des vieux hommes blancs morts, règles inégalitaires apprises à toutses* les français⋅e⋅s* à l’école…
La langue que nous parlons par défaut est masculiniste, ce mot étant employé dans le sens de « défense des privilèges masculins dans la société, au détriment des droits des femmes » (définition de la chercheuse Pierrette Bouchard, source).
La langue apprise à l’école est également binaire, c’est-à-dire construite sur l’idée qu’il existe deux et seulement deux sexes distinctement identifiables (féminin / masculin), ce qui est faux. L’étoile reprise après les formulations masculin⋅féminin (exemple : « humain·e⋅s ») est un symbole de « non-binarité » des communautés inter-sexes pour prendre en compte les êtres humain·e⋅s* qui ne se reconnaissent ni dans la catégorie « homme » ni dans la catégorie « femme ».
Ces mises à jour de langage visent non seulement à prendre en compte l’ensemble des humain·e⋅s*, mais aussi par exemple à utiliser des expressions françaises plutôt que de l’anglais, à favoriser les inventés, à remplacer les mots récupourris par les marchands de peur pour pouvoir dire ce que je pense vraiment, etc.⋅
1- Féminin genre neutre ?
Une façon extrêmement simple et qui aurait le mérite d’être claire serait de dire : ok y’a eu le masculin défini comme « genre neutre », on change un peu, maintenant c’est le féminin genre neutre ! Et donc tout serait au féminin, « bonjour mesdames, nous sommes toutes réunies pour parler de langue égalitaire, oui mes chères amies, vous les grandes Femmes de ce pays, avec ou sans pénis*, c’est bien à vous qui lisez ces lignes que je m’adresse », etc. Messieurs, qu’en dites-vous ? Ça fait un petit travail sur l’égo ? 😉
Bon. C’est un exercice à pratiquer je pense, par contre comme règle à long terme ça ne me convient a priori pas puisque c’est remplacer une hérésie inégalitaire par une autre : le féminin ne peut pas être neutre, pas plus que le masculin.
Mais… Dans pas mal de cas, quand on dit le féminin, le masculin est inclus dedans puisqu’on rajoute quelque chose au masculin pour en faire le féminin. Exemple : dire « les participantes » peut être considéré comme un féminin « genre neutre » égalitaire puisque « participants » est dit (quatre premières syllabes du mot complet), et « participantes » aussi (mot complet). Donc, le féminin « genre neutre » serait moins inégalitaire que le masculin « genre neutre ».
Donc si j’utilise la féminine « par défaut », je vais appeler ça la « féminine systématique » : ça veut bien dire que je l’utilise tout le temps, mais sans mentir et vouloir faire croire que ce serait « neutre ». En attendant d’inventer un vrai genre neutre, j’essaye d’utiliser la féminine systématique ! C’est une fantastique expérience pour rendre visible le fait que la langue que nous parlons par défaut n’est pas neutre du tout, et que parler le français appris à l’école, c’est avoir un comportement masculiniste…
2- Usage des deux genres ?
Je note ici pour le langage écrit, qui peut être assez différent du langage oral. C’est d’ailleurs peut-être un des points à améliorer ? Souvent à l’oral je vais dire les deux (« elle et il ont faim ») alors qu’à l’écrit j’utilise une forme « mixée » plus courte (« iels ont faim »)
Pronoms pluriels : les deux ou un mix
ils => « iels », « ille » ou « illes » (écrite), « elle et lui », « ils et elles » (orale)
Noms : point d’altérité ou majuscules
participant => participant·e ou participantE / citoyens => citoyen·ne·s ou citoyenNEs
J’ai découvert le point d’altérité grâce à Nicole Pradalier, linguiste anti-sexiste. C’est un point qui se distingue du point à la fin d’une phrase car il est plus haut sur la ligne d’écriture, à peu près à mi-chemin. Son blog : http://contre-la-precarite-et-le-sexisme.blogspot.fr/
SUR MAC : ⌥+⇧+F (Option + Majuscule + F) – il est défini en tant que « caractère » et peut donc être intégré dans n’importe quelle application (merci Franck)
Windows / Linux : ALT 250 (merci Frédéric) – dans les caractères spéciaux, peut être appellé « middle dot » (décimal 183)
3- Règle de proximité ?
« Que les hommes et les femmes soient belles ! » : on accorde l’adjectif avec le nom le plus proche…
4- … (à suivre)
Y’a pas que l’égalité…
Pour faire une langue de feu qui crame la langue de bois, il y a encore quelques trucs à modifier dans notre langue…
1- Plus besoin des anglicismes
e-mail => courriel, implémenter => mettre en place, week-end => samanche, challenge => défi
2- Assumons nos opinions
Les expressions hypocrites, plus besoin ! Exemples : « je suis pas raciste mais… » (argument raciste), « sans vouloir dénigrer, … » (argument dénigrant), etc. Si j’ai un truc à dire, ne pas me retrancher derrière des euphémisations.
Les expressions comme « les gens » sont des procédés réthoriques derrière lesquelles je me retranche pour cacher ma misanthropie, mon racisme ou mon manque de confiance dans l’humanité (ou en moi). Proposition : chaque fois que je dis ou j’entends une expression du genre « les gens sont comme-ci » ou « les gens feraient ça », alors PAUSE ! Quels gens ? C’est qui ? Des noms ? Toi tu en fais partie de ces gens ? Et moi ? C’est qui en vrai ?
* J’utilise cette idée de pénis pour que les personnes qui se reconnaissent comme des hommes comprennent que je m’adresse à eux aussi dans la phrase en féminin genre neutre, tout comme on s’adresse aux femmes en disant « les artisans français » en masculin genre neutre. Cependant, c’est maladroit ! Avoir un pénis ne fait pas forcément d’un humain un homme, le sexe biologique n’est pas forcément le sexe social, et cela fait bien longtemps que la biologie nous montre qu’il existe beaucoup plus que deux « sexes », et qu’il est impossible de trouver des paramètres biologiques universels pour séparer clairement l’humanité en deux groupes distincts qui seraient « hommes » et « femmes »